Tôt ce matin là, au Sani Top à la frontière entre le Lesotho et l’Afrique du Sud à 2873m, nous avons une décision importante à prendre concernant notre idée de randonnée depuis Sani Pass. Après être parti du même endroit la veille pour une randonnée dans le Drakensberg, j’annonce direct à mon compère Thomas:

Mec, je suis tout cassé.

Je prendrais bien quelques heures de sommeil en plus, tant mon corps est endolori des efforts de la veille. L’ascension de Thabana-Ntlenyana à 3482m n’a pas été un effort anodin, qui plus est sur une longue durée et hors piste. Des coups de soleil se font sentir partout là où la crème solaire n’est pas allée se fourrer et les débuts d’ampoule aux pieds n’ont pas disparu (ce qui ne m’arrive JAMAIS).

On doit s’attendre à une journée très difficile si l’on en reste au plan initial: la traversée hors sentier du plateau en direction du parc national Sehlabathebe, un des plus grands du Lesotho pour 4 jours au minimum depuis Sani Pass. Une belle expédition mais la sécheresse nous inquiète réellement, seul un guide nous a assuré de la présence de l’eau. Les autres personnes ne savent pas. Bien que je dispose de compétences pour filtrer l’eau éparse et de pastilles pour la traiter, je ne veux pas prendre de risques avec nos estomacs d’occidentaux dont l’un est justement susceptible en ce moment. Le no-go devient alors définitif, le plan B qui commençait à se dessiner s’impose.

On bascule en Afrique du Sud pour marcher sur le Giant’s Cup Trail et rejoindre ainsi à terme le parc national de Sehlabathebe.

C’est simple, ce trail de 3 à 5 jours est l’équivalent sud-africain de l’itinéraire que l’on voulait mener sur le plateau du Lesotho, à la différence près qu’on est certain de trouver de l’eau à des huttes, que l’itinéraire est tracé et à priori évident à suivre. La difficulté en est donc réduite.

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C’est ainsi que l’on se lance sur les pentes descendantes du col de Sani Pass côté Lesotho  en direction l’entrée du Giant’s Cup Trail une quinzaine de kilomètres plus bas. Entre les frontières respectives des deux pays, nous affrontons une piste raide et réservée exclusivement aux 4×4 et aux motards entraînés même par temps sec. Même les taxis ont de la misère à monter ces pentes atteignant parfois 20% ainsi que les nombreuses irrégularités de terrain malgré les travaux successifs pour aplanir la route La route de 9 km est même référencée dans les dangerous roads. Par temps chaotique, elle est bien évidemment fermée, ce qui ne manque pas d’arriver en Hiver. Plus on descend et plus l’eau qu’on cherchait vainement sur le plateau devient dorénavant omniprésente.

Le relief est ainsi fait pour que l’eau préfère l’Afrique du Sud au Lesotho. Et c’est pareil dans le parc national des golden gate Highlands plus au Nord.

Arrivés au départ du track un problème s’impose: nos cartes couvrent bien tout le secteur du trail mais le tracé n’est pas identifié, nous devons nous contenter de track notes auparavant téléchargées sur mon smartphone. Puisque l’on peut acheter une carte à la première hutte à Cobham, nous suivons les conseils de trekkeurs rencontrés auparavant: sans carte, c’est faisable.

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Un autre problème survient très rapidement: je suis en défaillance physique.

Mon corps craque complètement sous la lourdeur du ciel à 1700m d’altitude alors que la fraîcheur à 2800m m’allait très bien. J’ai de la misère à marcher en gardant l’équilibre et Thomas doit même faire le meneur pour me tirer. Le rythme très lent est démoralisant et nous craignons ne pas pouvoir arriver à temps à la hutte avant les orages de cet après-midi qui laisseront ensuite place au brouillard. Bien que des baboons attirent notre attention sur le sentier toujours clairement tracé, nous sommes surpris à l’approche d’une gorge vertigineuse à descendre avant de remonter l’autre versant.

Le plein d’eau sera fait ainsi qu’une bonne pause pour récupérer.

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Plus loin, face à la difficulté du sentier après avoir franchi une grotte et des barres rocheuses avec des échelles fixes, nous nous interrogeons définitivement sur notre situation.

Un coup d’oeil au track notes en dépit de la carte et.. OH MERDE. On a loupé l’intersection à droite il y a un petit bout de temps.

Voilà, confiance aveugle, instinct présent mais pas écouté, nous nous sommes lamentablement craqués en dépit d’avoir vu des paysages spectaculaires. Nous décidons de revenir en arrière au point où nous avons manqué de tourner à droite et j’avais bien senti que quelque chose ne tournait pas rond PILE à cet endroit là. J’aurai du regarder les track notes avec plus d’attention et il est vrai que continuer tout droit sur ce fameux sentier tracé sans se poser de questions était tout aussi facile.

Bref, un carrefour pédestre bizarrement constitué. Immédiatement, je mémorise mes erreurs pour que cela ne se reproduise pas, il est si facile de se sentir à tort tout puissant en pleine nature.

Comme prévu le temps tourne à l’orage en l’espace de quelques minutes et nous plantons la tente près de rochers pour casser le vent et près d’un arbre pour constituer un repère en cas de brouillard dense. Une fois dedans, un selfie nous rendra stupéfait face à nos mines complètement éreintées. C’est ainsi que l’on passera une belle nuit, à soigner mes ampoules et à dormir comme une tombe pour récupérer.

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Le lendemain, c’est le plan C qui est activé: direction Bushmans Nek en taxi à la frontière sud-africaine, au pied du plateau du Lesotho. Là, nous avons plus le droit à l’erreur pour continuer à voyager au Lesotho en légalité !

Conclusion: on aurait mieux fait d’y aller à cheval basuto !

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