Décidément les treks cette année ne me réussissent pas. Après ce voyage dans les Ecrins entre potes qui a tourné au vinaigre dont le retour d’expérience arrivera prochainement voici celui du Cape Wrath Trail en Ecosse.

Chronologie d’un trek avorté.

Le Cape Wrath Trail, kezaco ?

Pour résumer grosso modo, le Cape Wrath Trail, c’est 390 kilomètres à travers les Highlands sauvages depuis Fort William vers le Cape Wrath au nord ouest de la péninsule. Si certains le parcourent en une douzaine de journées, la plupart mettent au moins quinze jours voire vingt, en fonction des conditions météo pouvant ralentir l’avancée et détruire le moral des randonneurs par ailleurs.

Ce qui est pas mal avec cet itinéraire, c’est justement qu’il y en a pas de tout cuit tout fait: en gros, vous devez absolument savoir lire une carte topographique, car il n’y a pas de balisage et le marquage au sol est aléatoire. Et le clou du spectacle ? Il y a des variantes de partout, ce qui laisse une grande liberté aux randonneurs.

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Plus que pour les autres treks, le Cape Wrath Trail est un cheminement vers un point précis qu’est ce Cape Wrath qu’un trek bien tracé. Attention il est nécessaire d’avoir de l’expérience et de savoir bien gérer les parties engagées.

Jour 1: Glenfinnan – A’Chuil

Depuis le car park immense de Glenfinnan, point de départ du trek,  je m’équipe pour la “guerre” comme au temps ou je partais en trek en Nouvelle-Zélande, à côté des touristes venant voir le viaduc ayant servi de décor à Harry Potter. Tout ça pour ça me dis-je. Décalage et contraste quand j’enfile chaussures non imperméables tout prêtes à être remplies d’eau, guêtres toutes prêtes à recevoir de la boue et veste imperméable toute prête à recevoir pluie et vent.

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Gare à l’excès de confiance, l’itinéraire prévu est sauvage, loin des routes et la présence humaine rare.

En quelques minutes j’atteins la première bothy, Corryhully avant que le chemin ne s’élève franchement vers un premier col dans les 400m. La météo écossaise et le wilderness m’accueillent chaleureusement avec cette magnifique vallée que je vais suivre longtemps notamment le long de la rivière. Inutile de vous dire que mes pieds sont gorgés d’eau depuis longtemps et mes guêtres empêtrées de boue.

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Les marécages deviennent récurrents et avancer tout en échappant aux sploufff dans l’eau devient une gageure. Je rattrape des frères et soeurs belges éprouvés par l’environnement écossais à en juger la boue sur leurs jambes et on finit l’étape ensemble jusqu’au bothy A’Chuil.

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Jour 2: A’Chuil – Sourlies

Remettre les chaussettes froides et humides est un premier supplice, les insérer dans les chaussures un autre et enfin mettre les guêtres serrant d’humidité les tibias un dernier.

Dehors le temps s’annonce désastreux, je dois admettre ne pas être très serein sur la journée à suivre. Le sentier est heureusement assez intuitif à suivre, des traces sont partout et des coups d’oeil à la carte permettent de connaître la direction approximative à suivre. La liberté est laissée au randonneur d’aller par où il veut, enfin surtout où il pleut.

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La pluie finit par arriver et continuera tout le long de la matinée. Et c’est là qu’intervient le premier problème majeur de ce trek: les chaussettes. Je me rends compte de l’erreur bête que j’ai commise en partant avec des paires synthétiques mais peu épaisses et donc moins chaudes. Alors qu’à la maison j’avais des chaussettes en laines merinos épaisses bonnes pour l’Hiver. J’aurais eu moins froid.

Mes pieds sont gelés à force d’être baignés dans l’eau froide, cette même eau qui gonfle le sentier à force de tomber du ciel. La conséquence est directe et joue sur mon moral: j’ai froid partout et ne peut rien faire contre. Je continue d’avancer sans discontinuer en augmentant la vigilance sur le sentier devenu difficile à marcher, notamment lors de gorges étroites le long d’une rivière à la descente d’un col vers le loch Nevis.

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Plusieurs fois je dois traverser des rivières qui sont bien gonflées et même si le niveau de l’eau ne présente pas de danger, le courant est tout de même assez conséquent.

J’arrive exténué à la bothy Sourlies et vu mon état je décide de ne pas aller plus loin aujourd’hui. Après m’être changé entièrement et alors que je peine à me réchauffer je me jette dans mon sac de couchage, écroulé de fatigue. Pour une bonne sieste durant toute l’après-midi.

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Le soir, je ne suis guère plus réchauffé et me sens faible. Mon énergie habituelle a disparu ce qui va de pair avec la raison de mon périple en Ecosse: prendre du temps pour réfléchir.

En clair, alors qu’au moment du coucher j’allume une bougie pour tenter de faire peur aux souris, j’envisage déjà de modifier mes plans.

Jour 3: Sourlies – Inverie

J’ai fini par éteindre la bougie à la vue des souris se promenant partout y compris à quelques centimètres de moi sur mon banc de couchage. Au réveil, je me lève comme si de rien n’était avant de constater le carnage: mon sac à dos, pourtant suspendu a été attaqué par les souris. Elles ont réussi à attaquer un ziplock de moins bonne qualité depuis l’extérieur du sac ! Elles ont aussi mangé la mousse des bretelles du sac, ainsi que d’autres babioles dont les poignées en liège de mes bâtons de marche.

Surréaliste.

Je me prépare complètement sonné pour une nouvelle journée de marche tout en décidant de sortir du trek. Le moral est au plus bas, inutile de me forcer à affronter plus que cela les éléments naturels qui ne seront pas -de facto- pas en ma faveur. Il me faut néanmoins 5h de marche pour rejoindre Inverie située sur la péninsule de Knoydart et uniquement accessible en bateau ou à pied. De là je peux rejoindre Mallaig le premier village sur le “continent”.

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Mais en attendant la marche exit-oire (un terme inventé, cherchez pas) n’est pas une partie de plaisir. Le froid envahit toujours mes pieds à travers ces mêmes chaussettes. Je m’amuse à couper tout droit dans un vaste marécage car j’avais en ligne de mire un point de repère. Dans ces moments là, je me sens libre, la nature me laisse entrer dans son fort. La nature est un cadeau, il faut la prendre telle quelle, comme la morale que j’ai personnellement tiré du livre “Quitter le monde”.

Je n’ai vu personne depuis 24h, rien d’étonnant, cela m’est déjà arrivé plusieurs fois. Pourtant quelque chose cloche. Non seulement l’énergie n’est pas là mais marcher seul pendant des kilomètres et des kilomètres dans la nature sauvage m’est devenu routinier (trop ?). Conclusion, j’ai besoin de nouveauté, peut-être que je suis nettement plus enclin à partager et marcher à plusieurs.

Le reste de la journée menant à Inverie est anecdotique excepté la grimpette d’un col dont la descente sera longue et fastidieuse vers Inverie, hameau depuis lequel je pose ma tente dans un camping aménagé. Le soleil fait enfin son apparition le soir histoire de me redonner un peu d’énergie.

J’ai bien envie de revenir pour continuer le CWT mais il me faudra penser la chose autrement.

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